SADIA ALIAS ADJARA: JE SUIS UNE APPRENTIE GBAKA ET REPARATRICE DE TELEPHONE PORTABLE A ADJAME.

REPORTAGE :leadership des jeunes mères dans le milieu du transport ivoirien.
Issue d’une famille modeste et nombreuse de cinq enfants, Sadia Blandine ayant pour parents des cultivateurs dans la région du Tonpki, s’est fait respecter dans le milieu du transport commun ivoirien par son amour acharné du travail bien fait. Orpheline de père depuis 1993, Sadia abandonne ses études en classe de CM2 suite à la crise post électoral de 2002 pour des raisons financières. Une fois à Abidjan à l’âge de 15 ans, elle se lance dans le debrouilladisme laissant les travaux champêtres pour subvenir aux besoins de ses petits frères et de leur mère. Tous les matins à quatre heures, Blandine parcours environ un kilomètre de distance pour rejoindre son chauffeur à la gare pour les différents voyages de la clientèle. À la gare d’adjamé liberté – Bingerville on l’appelle affectueusement ADJARA, surnom qui lui vient de ses collaborateurs : syndicats, chauffeurs et apprentis de Gbaka*. Pour tout le petit monde qui compose l’ écosystème en constante ébullition, de cette gare de transport , Adjara de son vrais nom : Sadia Blandine est dit-on une fille brave , une collègue fiable , une concurrente de taille mais aussi une sœur, une amie, confirme Ibrahim un autre apprenti GBAKA dans un langage familier le Noushi* « hé mon vié, la vielle mère Adjara est trop gentil avec tout le monde ici, nous on l’appelle go sans bruit » va-t-il déclarer. Au travers de la foule et le brouhaha de la gare, chaussée de lêkê* puis vêtu d’un pantalon jean et d’un tee-shirt, elle nous guide dans son monde, Un monde qu’on a pris l’habitude de regarder de loin, et avec lequel on pas toujours eu les interactions les plus réjouissantes ! A Adjamé liberté CIE Adjara nous conduit dans le quartier à quelques pas de la route dans son box. Un petit magasin en tôle d’à peine 10 mètres carrés, aménagé pour faire office d’espace de travail multi-usage. C’est son atelier de réparation de téléphones mobile, sa boutique de vêtements traditionnels, mais également l’espace où elle offre ses services de charge à la demande de batterie de téléphone portable. Le local est plus que mis à profit par cette jeune entrepreneure qui avec rigueur mais délicatesse veille à la bonne marche de son petit commerce, un business qui lui permet de trouver une occupation saine pour les jeunes filles venues de son association et qui sont sous son aile. Dans la suite de notre entretien ADJARA, nous explique sa motivation « moi à l’âge de 12 ans j’ai perdu mon papa dans la crise à Man, et donc j’ai décidé de me battre pour gagner ma vie, ma famille est pauvre. C’est un vieux père à Bingerville qui m’a montré comment réparer les téléphones et après je suis venue à la gare ici pour chercher un travail. Un chauffeur a accepté et aujourd’hui j’ai mon permis de conduire et ma carte de transporteur » déclare notre hôte du jour. Après qu’elle ait quitté plus tôt les bras aimants de son compréhensif , indéfectible compagnon, lui-même chauffeur de Gbaka* et le calme de leur domicile à williamsville , La journée de travail d’ Adjara, commence dès 9 heures du matin pour s’achever à 9 heures le lendemain matin soit 24 heures bien comptées de taches ardues.. La constance de la contrainte d’une posture inconfortable ; les nécessaires mouvements parfois à hauts risque , pour suivre le rythme du véhicule à grande vitesse… tout ceci pendant de longues heures très souvent sous le brulant soleil du climat tropical subsaharien du pays . Quelques sourires en passant, des silences, et puis de petites blagues sans en faire trop, Dans son Gbaka* pendant le trajet, rien n’ébranle sa sérénité, son attitude respectueuse et avenante envers ses clients qui quelque fois en passant lui laissent des pourboires pour l’encourager, lui dire leur satisfaction ! Une cliente, dame Koutouan agent commercial d’une banque de la place nous laisse entendre par ses propos « c’est une fille courageuse, polie et elle s’est parler aux clients avec respect, moi j’aime bien monter dans son gbaka pour aller chez moi si j’ai la chance de la voir » souligne-t-elle. Rien ne reste figé lors de notre voyage, les mouvements sont presque toujours les mêmes mais la plupart du temps pas les gens. Tantôt à l’intérieur du Gbaka* tantôt dehors sur le chaud bitume à la recherche de nouveaux clients, Adjara est dans son élément. Elle est debout accrochée à sa portière comme pour dire qu’elle s’accroche à la vie, à l’espoir malgré les difficultés quotidiennes ! Adjara ne rêve pas d’être apprentis gbaka toute sa vie, non, pour elle ce n’est qu’un tremplin, avec son compagnon ils ont en projet de monter une compagnie de transport. Ce n’est pas un fantasme mais une ambition bien planifiée, elle a même déjà acquis son permis de conduire et sa carte de transporteur. Il ne reste plus qu’à acheter le véhicule pour le démarrage de leur activité, mais l’état actuel de ses économies n’est pas suffisant pour une telle transaction ! Un prêt au remboursement échelonné sur 4 voire 5 ans serait le bienvenu. Adjara est maintenant une habituée des caméras, comme elle a pris l’habitude des regards parfois insistants, des gens pendant l’exercice de son métier. Les plateaux télés les plus célèbres du pays elle en a déjà fait, elle a même déjà été le sujet de bien d’articles et reportages de presse. Mais jusqu’à maintenant aucune aide n’est à signaler de la part de qui que ce soit pour l’achat du véhicule qui permettra de démarrer son entreprise de transport. À notre micro Adjara en appel à la bonne volonté des femmes et hommes d’affaire philanthropes, des acteurs du secteur de l’automobile en Côte d’ivoire : importateurs, concessionnaires ; des particuliers intéressés par l’opportunité de lui octroyer un prêt ; de toute institution, organisation d’aide au développement etc. Elle a besoin d’assistance pour mener à bien son projet car elle n’est pas seule et regroupe au sein d’une association des jeunes filles dans le milieu du transport parfois sans activités et toute sorties du système scolaire. Le milieu du transport en Côte d’ivoire est monopolisé par la gente masculine. Contraintes, socio-culturelles ; physiologiques ou simple choix stratégiques ? La question reste posée. Les jeunes filles et femmes en côte d’ivoire qui se fraient un chemin dans ce secteur parfumé de testostérone ne sont pas légions mais pas moins remarquables par leur capacité à faire fi des inégalités afin d’évoluer dans un milieu hautement concurrentiel. « Certes, la gare est souvent violente mais on y gagne son pain dignement si on l’a vite compris donc il y’a la place pour toutes jeunes filles et moi je compte les encourager car ce n’est pas facile » affirme Sié Marcelle l’un des chefs syndicats de la gare. Il y a sous le soleil de la turbulente métropole abidjanaise et dans bien d’autres lieux du pays, d’inspirants parcourt a l’instar de celui de notre grouilleuse du jour. des témoignages de bravoure de ces amazones des temps modernes, ces femmes africaines et paysannes qui comme Adjara , contre vents et marées , travaillent dure., se font leur place dans des professions réputées masculines , remodelant ainsi nos codes socio-économiques. Aujourd’hui, les femmes battantes, divergentes, courageuses et aventurières des «territoires masculins », Ce font remarquées dans le milieu urbain comme agricole. Il est notre devoir de les raconter, les célébrer dans l’univers du paysan plus. * Gbaka : mini bus très souvent de 18 places, utilisé pour le transport en commun. Il sert de transport de liaison des zones urbaines et interurbaines avec des arrêts informels et un coût relativement abordable. *lêkê : chaussure fermée en caoutchouc portée majoritairement par les personnes ayant un faible revenu. ALEX ADOU pour LE Grouilleur info 95 lignes

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